Shurangama Sûtra
Sûtra de la Marche héroïque
Volume III
2 «Il en va ainsi à tous les niveaux, jusqu'aux cinq skandhas et aux six entrées, aux douze endroits et aux dix-huit domaines; l'union et le mélange de diverses causes et conditions rendent compte de leur existence fausse et illusoire, et la séparation et la dispersion des causes et conditions résultent dans leur extinction illusoire et fausse.
3 «Qui aurait pensé que la production et l'extinction, allant et venant sont fondamentalement l'éternelle merveilleuse lumière de l'Ainsi-Venu, la perfection inchangée, et pénétrant partout, la merveilleuse nature de la Véritable Ainsité! Si au sein de la vraie et éternelle nature on cherche en allant et venant, la confusion et l'Eveil, ou la naissance et la mort, on ne les trouvera jamais.
4 «Ananda, pourquoi dis-je que les cinq skandhas sont fondamentalement la merveilleuse nature de la véritable ainsité, le Trésor de l'Ainsi-Venu? Ananda, imagine une personne qui aurait la claire vision et qui devait observer le clair et brillant espace. Son regard ne percevrait que claire vacuité vide de quoi que ce soit d'autre.
5 «Si alors cette personne, pour aucune raison particulière fixait son regard, elle se fatiguerait de garder les yeux ouverts. Ainsi dans l'espace vide, elle verrait des fleurs illusoires et autres apparences irréelles illusoires et désordonnées. Tu dois te rendre compte que le skhanda de la forme est ainsi.
6 «Ananda, ces fleurs illusoires ne tirent pas leur origine de l'espace et ne proviennent pas des yeux. En fait, Ananda, si elles provenaient de l'espace, provenant de là elles devraient aussi retourner et entrer dans l'espace. Mais si les objets devaient y entrer et le quitter, l'espace ne serait pas vide. Et si l'espace n'était pas vide, alors il n'y aurait aucune place pour qu'il puisse contenir les fleurs qui pourraient apparaître et disparaître, tout comme le corps d'Ananda ne peut pas contenir un autre Ananda.
7 «Si les fleurs provenaient des yeux, comme elles en viennent, elles devraient y retourner. Si l'image des fleurs tirait son origine des yeux, alors elles devraient elles-mêmes avoir la vue. Si elles voyaient, quand elles vont dans l'espace, elles devraient être capables de virer de bord et de voir les yeux de la personne. Si elles n'y voyaient pas, alors en sortant, elles obscurciraient l'espace et en revenant, elles obscurciraient les yeux.
9 «Mais quand la personne verrait les fleurs, ses yeux ne pourraient pas avoir été obscurcis. Mais au contraire, n'est ce pas lorsque nous voyons le clair espace que nous disons que notre vue est claire? A partir de là, vous devriez comprendre que le skhanda de la forme est vide et faux. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribué ni aux causes, ni aux conditions ni à la spontanéité.
9 «Ananda, suppose que les mains et les pieds d'une personne seraient détendus et que son corps en entier serait en équilibre. Il ne se rendrait pas compte de ses processus vitaux au point de ne ressentir ni douleur ni plaisir. Alors, pour aucune raison particulière, elle pourrait se frotter les mains ensemble, créant ainsi la sensation illusoire de la friction et de la douceur, du chaud et du froid, et d'autres sensations.
10 «Tu dois te rendre compte que le skhanda de la sensation est ainsi.. Ananda, ce contact imaginaire n'a pas commencé dans l'air environnant, ni dans les paumes. En fait, Ananda, s'il avait commencé dans l'air, vu que le contact affectait les paumes, pourquoi n'affectait-il pas le reste du corps? Et pourquoi l'air devrait-il choisir ce avec quoi il vient en contact?
11 «Si la sensation venait des paumes, il n'y aurait en rien besoin de frotter les mains pour en faire l'expérience. A part ça, si elle provenait des paumes, celles-ci en feraient l'expérience lorsqu'elles sont jointes, mais séparées, le sentiment de contact devrait rentrer dans les paumes. Et en ce cas, les bras, les poignets, les os et la moelle devraient également être conscients de son trajet d'entrée.
12 «Si tu insistes que le mental devrait être conscient de sa sortie et de son entrée, le contact serait dans ce cas une chose par elle-même qui vient du et va au corps. Quel besoin y aurait-il d'attendre pour que les paumes se joignent pour le ressentir et l'identifier en tant que contact? De là tu devrais comprendre que le skhanda de la sensation est vide et faux. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux causes ni aux conditions ni à la spontanéité.
13 «Ananda, suppose que l'eau vienne à la bouche d'une personne à la seule mention de prunes amères, ou que la plante des pieds lui picotait lorsqu'elle penserait à une promenade le long d'un précipice.
14 «Tu dois te rendre compte que le skhanda de la pensée est ainsi. Ananda, l'eau à la bouche causée par la mention de prunes ne vient pas des prunes ni ne vient elle de la bouche.
15 «En fait, Ananda, si l'eau à la bouche provenait des prunes, celles-ci devraient parler d'elles-mêmes; pourquoi attendre que quelqu'un d'autre le fasse ? Si elle provenait de la bouche, la bouche elle-même devrait entendre, et alors pourquoi faudrait-il compter sur la perception des oreilles ? Si seule l'oreille entendait, dans ce cas pourquoi ne produit-elle pas la salive? On peut expliquer les pensées à propos de la promenade le long d'un précipice de la même façon.
16 «De là, tu dois comprendre que le skhanda de la pensée est vide et faux. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux causes ni aux conditions ni à la spontanéité.
17 «Ananda, suppose que de vifs rapides faisaient des vagues qui se suivraient l'une l'autre en succession ordonnée, celles qui suivent ne dépassant jamais celles qui précèdent.
18 «Tu dois te rendre compte que le skhanda de l'activité est ainsi. Ananda, ce flot n'a pas lieu à cause de la vacuité, ni ne vient-il à être à cause de l'eau. Il n'est ni identique à l'eau et pourtant il n'est séparé ni de la vacuité, ni de l'eau.
19 «En fait, Ananda, si le flot avait lieu à cause de la vacuité, alors l'inépuisable vacuité dans les dix directions deviendrait un flot sans fin et tous les mondes finiraient inévitablement noyés. Si les vifs rapides existaient à cause de l'eau, alors il faudrait qu'ils diffèrent de l'eau et le lieu et les attributs de leur existence seraient apparents. Si les rapides étaient identiques à l'eau, alors lorsque les rapides disparaissent et deviennent calmes et claires, l'eau devrait elle aussi disparaître.
20 «Suppose que les rapides étaient séparés et de la vacuité et de l'eau. Mais il n'y a rien au-delà de la vacuité, et sans eau, il ne pourrait y avoir de flot. De là, tu dois comprendre que le skhanda de l'activité est vide et faux. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux causes ni aux conditions ni à la spontanéité.
21 «Ananda, suppose qu'un homme ramassait un pichet kalavinka, bouchait ses deux trous, le pichet rempli de vacuité, et qu'après avoir marché quelques mille milles plus loin, le présentait dans quelqu'autre pays. Tu dois te rendre compte que le skhanda de la conscience est ainsi.
22 «Ananda, que la vacuité ne vient pas d'un endroit, et elle n'est pas allée dans un autre.
23 «En fait, Ananda, si la vacuité devait provenir d'un endroit, alors lorsque la vacuité emmagasinée dans le pichet était transportée ailleurs, il y aurait moins de vacuité à l'endroit où le pichet se trouvait à l'origine.
24 «Et s'il devait entrer dans l'autre région, lorsque les trous sont débouchés et que le pichet était renversé, on en verrait sortir de la vacuité. De là, tu dois comprendre que le skhanda de la sensation est vide et faux. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux causes ni aux conditions ni à la spontanéité.
25 «Qui plus est, Ananda, pourquoi dis-je que les six entrées sont fondamentalement la merveilleuse nature de la Véritable Ainsité, le Trésor de l'Ainsi-Venu ? Ananda, bien que de garder les yeux ouverts cause de la fatigue, autant les yeux que la fatigue tirent leur origine de la Bodhi. Les attributs de la fatigue proviennent du fait de fixer avec les yeux ouverts.
26 «A cause des deux faux attributs impurs de la lumière et de l'obscurité, un sens de la vue est stimulé qui a son tour profite de ces deux attributs impurs. C'est ce qu'on appelle la capacité de voir. A part de ces deux attributs impurs de la lumière et de l'obscurité, cette vue est, en fin de compte, sans substance.
27 «En fait, Ananda, il faut que tu saches que la vue ne provient ni de la lumière ni de l'obscurité, ni de l'organe sensoriel, ni de la vacuité. Pourquoi pas? Si elle tirait son origine de la lumière, alors elle s'éteindrait lorsqu'il y a l'obscurité, et tu ne verrais pas l'obscurité. Si elle tirait son origine de l'obscurité, alors elle s'éteindrait lorsqu'il y a la lumière, et tu ne verrais pas la lumière. Si l'essence de la vue venait de l'organe de la vue, qui est évidemment dépourvu de lumière et d'obscurité, alors en ce cas, fondamentalement aucune vue ne prendrait place.
28 «Si elle provenait de la vacuité, alors en regardant à l'avance, elle verrait les formes des phénomènes mondains ; en regardant en arrière, elle verrait l'oeil lui-même. Qui plus est, si c'était la vacuité elle-même qui voyait, que ça aurait à voir avec ton oeil?
29 «De là, il te faut comprendre que l'entrée de l'oeil est vide et fausse? Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux causes ni aux conditions ni à la spontanéité. Ananda, suppose qu'une personne bouche brusquement ses oreilles avec ses doigts. Parce que l'organe de l'ouïe se fatiguerait, il entendrait un son dans sa tête. Cependant, et l'oreille et la fatigue prennent origine dans la Bodhi. Les attributs de la fatigue proviennent de la monotonie.
30 «A cause des deux faux attributs impurs du mouvement et de l'immobilité, un sens de l'ouïe est stimulé qui a son tour profite de ces deux attributs impurs. C'est ce qu'on appelle la capacité d'entendre. A part de ces deux attributs impurs du mouvement et de l'immobilité, cette ouïe est, en fin de compte, sans substance.
31 «En fait, Ananda, il faut que tu saches que l'ouïe ne provient ni du mouvement, ni de l'immobilité, ni de l'organe sensoriel, ni de la vacuité.
32 «Pourquoi cela? Si elle provenait de l'immobilité, elle serait éteinte lorsqu'il y a mouvement, et tu n'entendrais pas le mouvement. Si elle provenait du mouvement, elle serait éteinte lorsqu'il y a immobilité, et tu ne te rendrais pas compte de l'immobilité.
33 «Si la capacité d'entendre provenait de l'organe sensoriel, qui est évidemment dépourvu de mouvement et d'immobilité, alors en ce cas, l'ouïe n'aurait fondamentalement pas de nature propre. Suppose qu'elle provenait de la vacuité ; dans ce cas, la vacuité deviendrait l'ouïe et ne serait plus vide. Qui plus est, si c'était la vacuité elle-même qui entendait, qu'est-ce que ça aurait à voir avec tes oreille?
34 «De là, il te faut comprendre que l'entrée de l'oreille est vide et fausse. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux causes ni aux conditions ni à la spontanéité. Ananda, suppose qu'une personne inspire profondément par le nez. Après avoir gardé son souffle longtemps, elle se fatiguerait et aurait alors une sensation de froid dans le nez.
35 A cause de cette sensation on fait toutes sortes de distinctions de pénétration et d'obstruction, de vacuité et de d'actualité, etc. y-compris toutes sortes de vapeurs odorantes ou puantes. Cependant, et le nez et sa fatigue prennent origine dans la Bodhi. Les attributs de la fatigue proviennent du surmenage.
36 «A cause des deux faux attributs impurs de la pénétration et de l'obstruction, un sens de l'odorat est stimulé qui a son tour profite de ces deux attributs impurs. C'est ce qu'on appelle la capacité de sentir. A part de ces deux attributs impurs de la pénétration et de l'obstruction, cet odorat est, en fin de compte, sans substance.
37 .«En fait, Ananda, il faut que tu saches que l'odorat ne provient ni de la pénétration ni de l'obstruction, ni de l'organe sensoriel, ni de la vacuité.
38 «Pourquoi cela? S'il provenait de la pénétration, l'odorat s'éteindrait lorsqu'il y a obstruction, et comment pourrais-tu ressentir l'obstruction?. S'il existait à cause de l'obstruction, lorsqu'il y a pénétration, il ne pourrait y avoir d'odorat ; en ce cas comment pourrait venir à être la conscience des parfums, des puanteurs et autres sensations du même genre ? Si le mécanisme de l'odorat provenait d'un organe sensoriel qui est évidemment privé de pénétration et d'obstruction, alors en ce cas, fondamentalement, l'odorat n'aurait pas de nature propre.
39 «S'il provenait de la vacuité, alors l'odorat lui-même devrait pouvoir se retourner et sentir son propre nez. Qui plus est, si la vacuité elle-même était responsable de l'odorat, qu'est-ce que ça aurait à voir avec ta capacité à sentir? De là tu dois comprendre que l'entrée du nez est vide et fausse. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux cause et aux conditions ni à la spontanéité.
40 «Ananda, suppose qu'une personne lèche ses lèvres du bout de sa langue. Lécher à l'excès lui cause de la fatigue. Si la personne est malade, elle décèlera un goût doux. La douceur et l'amertume démontrent le sens du goût de la langue. Lorsque l'organe est inactif, il y a un sens d'insipidité. Cependant, autant la langue que la fatigue ont leur origine dans la Bodhi. Les attributs de la fatigue proviennent du pourléchage prolongé.
42 «A cause des deux faux attributs impurs de la douceur et de l'amertume, un sens du goût est stimulé qui a son tour profite de ces deux attributs impurs. C'est ce qu'on appelle la capacité de goûter. A part de ces deux attributs impurs de la douceur et de l'amertume, le goût est originellement sans substance.
43 .«En fait, Ananda, il faut que tu saches que la perception de la douceur, de l'amertume ou de l'insipidité ne provient ni de la douceur ni de l'amertume, ni de l'insipidité, ni de l'organe sensoriel, ni de la vacuité.
44 «Pourquoi cela? S'il provenait de la douceur, le goût cesserait d'exister lorsqu'il y a insipidité, et comment pourrais-tu reconnaître l'insipidité?. S'il provenait de l'insipidité, il disparaîtrait lorsque la saveur douce serait goûtée ; en ce cas comment pourrait percevoir les deux saveurs du doux et de l'amer ? S'il provenait de la langue qui est évidemment privée de douceur, d'amertume et d'insipidité, alors en ce cas le goût n'aurait pas de nature propre.
45 «S'il provenait de la vacuité, alors le sens du goût devrait être ressenti par la vacuité au lieu de la bouche. Qui plus est, si c'était la vacuité elle-même qui goûte, qu'est-ce que ça aurait à voir avec ta langue ? De là tu dois comprendre que l'entrée de la langue est vide et fausse. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux cause et aux conditions ni à la spontanéité.
46 «Ananda, suppose une personne qui toucherait sa main chaude de sa main froide. Si le froid était plus grand que la chaleur, la main chaude refroidirait; si la chaleur était plus grande que le froid, la main chaude se réchaufferait. Cette sensation de chaleur et de froid est ressentie grâce au contact et à la séparation des deux mains. Le contact fatigant résulte du mélange du chaud et du froid. Cependant, autant le corps que la fatigue tirent leur origine de la Bodhi. Les attributs de la fatigue proviennent du contact prolongé.
46-47 «A cause des deux faux attributs impurs de la séparation et de l'union, un sens du toucher est stimulé qui a son tour profite de ces deux attributs impurs. C'est ce qu'on appelle la conscience de la sensation physique. A part de ces deux attributs impurs de la séparation et de l'union, la conscience de la sensation est originellement sans substance.
47 «En fait, Ananda, il faut que tu saches que cette sensation ne provient pas de la séparation et de l'union, ni n'existe-t-elle à cause du plaisir et de la douleur, pas plus qu'elle ne provient de l'organe sensoriel, ni n'est elle produite par la vacuité.
48 «Pourquoi cela? Si elle survenait lorsqu'il y a union, elle disparaîtrait lorsqu'il y a séparation, comment pourrait-elle alors ressentir la séparation? Il en irait de même pour ces deux caractéristiques de plaisir et de douleur. Si cela provenait de l'organe sensoriel, qui est évidemment dépourvu des quatre caractéristiques de l'union, de la séparation, du plaisir et de la douleur, alors en ce cas, alors en ce cas, fondamentalement aucune vue ne prendrait place.
49 «S'il provenait de la vacuité, alors la conscience de la sensation devrait être ressentie par la vacuité elle-même. Qu'est-ce que ça aurait à voir avec ton corps ? De là tu dois comprendre que l'entrée du corps est vide et fausse. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux cause et aux conditions ni à la spontanéité.
49-50 «Ananda, suppose une personne qui serait si fatiguée qu'elle irait dormir. Ayant dormi profondément, elle se réveille et tente de se rappeler ce qu'elle a ressenti alors qu'elle dormait. Elle se rappelle des choses et en oublie d'autres. De la sorte, cette inversion passe par la production, la permanence, le changement et l'extinction, qui sont habituellement pris et traités par le système central du mental, chacun à la suite de l'autre sans jamais de chevauchement. C'est ce qui est appelé la capacité de savoir. Le mental et sa fatigue sont tous deux la Bodhi. Les attributs de la fatigue viennent de la pensée persistante.
51 «Les deux attitudes impures du surgissement et de la cessation stimulent un sentiment du savoir qui à sont tour saisit ces données sensorielles internes, renversant ainsi le flot de la vue et de l'ouïe. L'endroit au-delà de la saisie de ce flot est connue comme faculté de l'intellect.
52 «A part de ces deux ensembles d'attitudes impures de l'éveil et du sommeil et du surgissement et de la cessation, la faculté de l'intellect est originellement sans substance.
53 «En fait, Ananda, il faut que tu saches que la faculté de l'intellect ne provient pas de l'éveil, du sommeil, du surgissement ni de la cessation, ni de l'organe du mental, ni de la vacuité. Pourquoi cela? Si elle provenait de lu réveil; elle disparaîtrait durant le sommeil, et comment pourrait-elle alors éprouver le sommeil? Si elle provenait du surgissement, elle cesserait d'exister au moment de la cessation, et comment pourrait-elle ressentir la cessation? Si elle provenait de la cessation, elle disparaîtrait au moment du surgissement, et comment pourrait-elle ressentir le surgissement ?»
54 «Si la conscience mentale provenait de la faculté de l'intellect, elle ne serait rien de plus que l'ouverture et la fermeture physique causées par les états respectifs de l'éveil et du sommeil. A part de ces deux mouvements, la faculté de l'intellect serait aussi insubstancielle que des fleurs dans l'espace et en ce cas, il ne pourrait fondamentalement exister aucune cognition. Si la conscience mentale provenait de la vacuité, alors la vacuité elle-même devrait devenir cognition. Qu'aurait-elle alors à voir avec l'entrée du mental ?. De là tu dois comprendre que l'entrée du mental est vide et fausse. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux cause et aux conditions ni à la spontanéité.
55 «Qui plus est, Ananda, pourquoi dis-je que les doux places sont fondamentalement la merveilleuse nature de la Véritable Ainsité, le Trésor de l'Ainsi-Venu ?
56 «Ananda, considère encore les arbres du Bosquet de Jeta et la rivière et les bassins. Qu'en penses-tu : est-ce que ces choses viennent à être parce que les formes surgissent et qu'alors les yeux les voient, ou parce que les yeux produisent les attributs de la forme ?
56-57 «Ananda, si les yeux devaient produire les attributs des formes, alors, lorsque les yeux regardent l'espace vide, les formes devraient être oblitérées. Une fois oblitérées, tout ce qui s'est manifesté devrait disparaître. Puisque les attributs des formes seraient alors absents, qui pourrait reconnaître la vacuité? Le même principe s'applique à la vacuité.
57 «Si, de plus, des formes surgissaient et que les yeux les voyaient, alors la vue devrait périr en regardant l'espace, qui n'a pas de forme. Une fois que la vue aurait péri, tout disparaîtrait et alors qui pourrait reconnaître autant la vacuité que la forme ?
58 De là tu dois comprendre que ni la vue ni la forme, ni la vacuité ne peuvent être situées, et qu'ainsi les deux places de la forme et de la vue sont vides et fausses. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux cause et aux conditions ni à la spontanéité. Ananda, écoute encore le tambour quand on le bat dans le Jardin de Jeta parce que la nourriture est prête. Le sangha se rassemble au son du tambour. Les sons de la cloche et du tambour se suivent l'un l'autre en succession.
59 «Qu'en penses-tu: ces choses viennent-elles à exister parce que le son arrive à proximité de l'oreille, ou parce que l'ouïe de l'oreille s'étend jusqu'à la source du son.
61 «Ananda, une fois encore, si le son arrivait à proximité de l'oreille, alors ce serait pareil que quand je vais mendier autour de la ville de Çravasti : je ne suis plus dans le Bosquet de Jeta. Et donc, si le son était venu précisément à proximité de l'oreille d'Ananda, alors ni Maudgalyayana ni Kaçyapa ne l'entendraient, et encore moins les douze cents cinquante Çramanas qui, ayant entendu le son de la cloche, viennent en même temps à la salle à manger.
62 «Encore une fois, si l'oreille arrivait à proximité du son, ce serait pareil que quand je reviens au Bosquet de Jeta : je ne suis plus à Çravasti. Lorsque tu entends le son du tambour, ton ouïe serait déjà à l'endroit où on bat le tambour. De sorte que si la cloche tintait, tu ne l'entendrais pas &emdash; et encore moins les sons des éléphants, des chevaux, du bétail, des moutons et tous les autres sons divers qui t'entourent.
63 «Cependant, sans le va et vient, il n'y aurait pas d'ouïe.
64 «De là tu dois comprendre que ni l'ouïe ni le son ne peuvent être situés, et qu'ainsi les deux places de l'ouïe et du son sont vides et fausses. Fondamentalement, leurs natures ne peuvent être attribuées ni aux cause et aux conditions ni à la spontanéité.
64-65 «Qui plus est, Ananda, tu sens le chandana dans cet encensoir. lorsqu'une particule de cet encens est allumée, on peut la sentir simultanément jusqu'à quarante milles autour de la cité de Çravasti.
65 «Qu'en penses-tu ? Est le bois de chandana qui produit ce parfum ? Est-elle produite dans ton nez ou surgit-elle dans la vacuité?
66 «Ananda, encore une fois, si le parfum était produite dans ton nez, ce qu'on dit qui est produit par le nez devrait sortir du nez. Ton nez n'est pas le chandana, aussi comment pourrait ton nez avoir le parfum du chandana ? Lorsque tu dis que tu sens un parfum, elle doit entrer dans ton nez. L'odorat n'est pas défini comme le nez qui émet un parfum.
67 «Si elle était produite de l'intérieur de la vacuité, comme la nature de la vacuité est éternelle et inchangeante, le parfum devrait-être constamment présentes. Pourquoi est-ce que la présence de ce parfum devrait alors être contingente au fait de brûler du bois sec dans cet encensoir ? Si elle provenait du bois, comme la nature de cet encens est qu'il donne de la fumée lorsqu'il brûle, alors, lorsque le nez la sent, le nez devrait être rempli de fumée, ce qui ne se produit pas. La fumée monte dans l'ai et avant d'avoir atteint cette distance, comment est-ce que le parfum serait déjà sentie à une distance de plus de dix milles?
68 «De là tu dois comprendre que ni le parfum n i le l'odorat du nez ne peuvent être situés, et qu'ainsi les deux places de l'odorat et de le parfum sont vides et fausses. Fondamentalement, sa nature ne peut être attribuée ni aux cause et aux conditions ni à la spontanéité.
69 «Ananda, deux fois par jour, tu prends ton bol en même temps que le reste de l'assemblée, et parmi ce que tu reçois, il peut y avoir des choses succulentes, comme du caillé, du babeurre, et du beurre clarifié.
70 «Qu'en penses-tu ? Ces saveurs sont elles produites par la vacuité, sortent-elles de la langue, ou sont-elles produites par la nourriture?
71 «Ananda, une fois encore, si les saveurs sortaient de ta langue, comme tu n'en as qu'une dans ta bouche alors lorsque cette langue a déjà goûté la saveur du caillé, elle ne changerait pas si elle tombait sur du sucre d'orge bien noir.
72 «Si elle ne changeait pas, alors on ne pourrait pas dire qu'elle décèle les goûts. Et pourtant, si elle changeait effectivement , comme la langue n'est pas faite de plusieurs substances, comment pourrait une seule langue connaître de si nombreux goûts ?
73 «Si les goûts étaient produits par la nourriture, comme la nourriture n'a aucune conscience, comment pourrait-elle connaître les goûts ? De plus si la nourriture elle-même devait les reconnaître, ce serait pareil que quelqu'un d'autre qui mange. Alors, quel rapport y aurait-il avec ce qu'on appelle ta reconnaissance des goûts ? Si les goûts étaient produits dans la vacuité, alors lorsque tu manges de la vacuité, quelle saveur aurait-elle ? Suppose que la vacuité avait la saveur du sel. Alors vue que ta langue est salée, ton visage devrait l'être lui aussi, et de même tout le monde serait comme des poissons dans l'eau. Comme tu serais constamment influencé par le sel, tu ne connaîtrais jamais l'insipidité. Et pourtant, si tu ne reconnaissais pas l'insipidité, tu ne serais pas conscient de la salinité non plus. Tu ne distinguerais rien du tout. Comment pourrait-on appeler ça le goût ?
74 «De là, tu dois comprendre que ni les saveurs, ni le goût de la langue ne peuvent être situés, et ainsi les deux places du goût et des saveurs sont vides et fausses. Fondamentalement, leurs natures ne peuvent être attribuées ni aux cause et aux conditions ni à la spontanéité.
75 «Ananda, tôt chaque matin, tu te frottes la tête de la main. Qu'en penses-tu ? Lorsque la sensation de frottement a lieu, que fait le toucher? Est-ce la tête ou la main qui touche ?
76 «Si la capacité de toucher était dans la main, alors la tête n'en aurait pas connaissance. Comment pourrait-on dire que la tête a été touchée ? Si c'était dans la tête, alors la main serait inutile, et comment pourrait-on dire qu'elle a été touchée ?
80 «Si chacune avait la capacité de toucher, alors toi, Ananda, tu devrais avoir deux corps. Si entre la tête et la main, il n'y avait qu'un seul toucher, alors la main et la tête n'auraient qu'une seule substance. Si elle n'avaient qu'une substance, alors aucun toucher ne serait possible.
81 «Si elles étaient deux substances, à laquelle appartiendrait le toucher? Celle qui serait capable de toucher ne serait pas celle qui est touchée. Celle qui est touchée ne serait pas celle qui est capable de toucher. Ce ne serait pas non plus que le toucher viendrait à être entre toi et la vacuité. De là tu dois comprendre que ni la sensation du toucher ni le corps ne peuvent être situés, et qu'ainsi les deux places du corps et du toucher sont vides et fausses. Fondamentalement, leurs natures ne peuvent être attribuées ni aux cause et aux conditions ni à la spontanéité.
82 «Ananda, ton mental est toujours conditionné par les trois qualités de bien, mauvais, et indéterminé, qui produisent des ordonnances de dharmas.
83 «Ces dharmas sont-ils produits par le mental, ou ont-ils une place spéciale séparée du mental ?
84 «Ananda, s'ils étaient le mental, les dharmas ne seraient pas ses objets impurs. Comme ils ne seraient pas des conditions du mental, comment pourrais-tu dire qu'ils ont un emplacement ? S'ils devaient avoir un emplacement spécial, séparé de celui du mental, alors les dharmas eux-mêmes seraient-ils capables de connaître ?
84-85 «S'ils avaient un sens du connaître, ils seraient appelés un esprit. Etant quelque chose d'autre que toi et n'étant pas pour autant des objets impurs, ils seraient l'esprit de quelqu'un d'autre. Etant la même chose que toi, ils seraient ton propre esprit. Mais comment ton esprit pourrait-il exister à part de toi ?
85 «S'ils n'avaient aucun sens de la connaissance, et que pourtant ces objets impurs n'étaient ni des formes, ni des sons, des odeurs ou des goûts, et pas non plus du froid et de la chaleur, ni la vacuité. Où seraient-ils situés ?
86 «Ils ne sont représentés ni en forme ni en vacuité, et il n'est pas non plus probable qu'ils existent quelque part dans le monde humain au-delà de la vacuité, car si c'était le cas, l'esprit ne serait pas conscient d'eux. D'où, alors, viendraient-ils ? De là tu dois comprendre que ni les dharmas ni l'esprit ne peuvent être situés, et qu'ainsi les deux places de l'esprit et des dharmas sont vides et fausses. Fondamentalement, leurs natures ne peuvent être attribuées ni aux cause et aux conditions ni à la spontanéité.
Shurangama Sûtra,
Volume 3, Seconde partie, texte du Sûtra:
87 «Qui plus est, Ananda, pourquoi dis-je que les dix-huit domaines sont fondamentalement la nature merveilleuse de la Véritable Ainsité, le Trésor de l'Ainsi-Venu ?
88 «Ananda, comme tu le comprends, les yeux et les formes créent les conditions qui produisent la conscience de l'oeil.
89 «Est-ce que cette conscience est produite à cause des yeux, en sorte que les yeux soient son domaine ? Ou est-elle produite à cause des formes, en sorte que les formes soient son domaine ?
89 «Ananda, si elle était produite à cause des yeux, alors en l'absence de vacuité et de forme, elle ne serait pas capable de faire des distinctions ; et alors, même si tu avais une conscience, que te servirait-elle ?
89 «Qui plus est, ta vue n'est ni verte, ni jaune, ni rouge, ni blanche. Il n'y a virtuellement rien dans quoi elle soit représentée. En conséquence, ta vue n'est ni verte, ni jaune, rouge ou blanche. Il n'y a virtuellement rien dans quoi elle soit représentée. En conséquence, de quoi le domaine serait-il établi ?
90 «S'il était le produit de la forme, alors, lorsqu'il n'y a pas de forme présentes dans la vacuité, ta conscience cesserait d'être. En ce cas, pourquoi c'est que la conscience reconnaît la vacuité?
91 «Si une forme change, tu es aussi conscient de la forme changeant d'apparence, mais ta conscience visuelle ne change pas. Où se situe la limite ?
91 «Si la conscience visuelle changeait lorsque change la forme, alors un tel domaine n'aurait pas d'attributs. Si elle ne changeait pas, elle serait constante, et, étant donné qu'elle a été produite à partir de la forme, elle ne devrait pas avoir une connaissance consciente de l'endroit où était la vacuité.
92 «Si elles étaient combinées, alors il y aurait un manque entre les deux. Si elles étaient séparées, alors la moitié de ta conscience visuelle posséderait la conscience et l'autre moitié en manquerait. avec des substances et des natures aussi chaotiques et désordonnées, comment pourraient-elles constituer un domaine ?
93 «De là, tu dois comprendre qu'en ce qui concerne les yeux et la formes qui seraient les conditions qui produisent le domaine de la conscience visuelle, aucune de ces trois places n'existe. Fondamentalement, la nature des yeux, des formes et le domaine de la conscience visuelle, tous trois, ne peuvent être attribués ni aux causes et conditions, ni à la spontanéité.
94 «Qui plus est, Ananda, comme tu l'entends, l'oreille et le son créent les conditions qui produisent la conscience auditive.
«Cette conscience est-elle produite à cause de l'oreille en telle sorte que l'oreille soit son domaine, ou est-elle produite à cause du son, en telle sorte que le son soit son domaine?
95 «Ananda, si elle était produite à cause de l'oreille, alors puisque le mouvement et l'immobilité manqueraient, l'oreille ne se rendrait compte de rien. Il est certain qu'en l'absence de la conscience, rien ne serait connu et ainsi, qu'est-ce qui caractériserait la conscience?
«Tu pourrais soutenir que les oreilles entendent, mais sans mouvement ni immobilité, rien ne peut se passer. d'autre part, comment la combinaison des oreilles, qui ne sont que des formes physiques, et des objets externes, pourrait-elle être appelée le domaine de la conscience ? Une fois encore, donc, comment le domaine de la conscience auditive pourrait-il être établi ?
96 «Si elle était le produit du son, alors la conscience existerait à cause du son, et n'aurait aucun lien avec l'ouïe. Sans ouïe, les attributs du son n'auraient pas d'emplacement.
«Si la conscience auditive provenait du son, étant donné que le son existe à cause de l'ouïe, alors ce que tu entends serait la conscience auditive elle-même.
97 «Si la conscience auditive n'était pas entendue, alors il n'y aurait pas de domaine. Si elle était entendue, elle serait alors la même chose que le son. Si la conscience était entendue, qui serait celui qui perçoit et entend la conscience ? Si personne ne percevait, alors à la fin, tu serais comme de l'herbe ou du bois.
98 «Et le son et l'ouïe ne pourraient se mélanger pour former un domaine entre les deux. Faute d'un domaine entre eux, comment ces phénomènes interne et externe pourraient-ils être identifié ?
98-99 «De là, tu dois comprendre qu'en ce qui a trait aux oreilles et aux sons qui seraient les conditions qui produisent le domaine de la conscience auditive, aucune de ces trois places n'existe. Fondamentalement, la nature des oreilles, des sons et le domaine de la conscience auditive, tous trois, ne peuvent être attribués ni aux causes et conditions, ni à la spontanéité.
99 «Qui plus est, Ananda, comme tu l'entends, le nez et les odeurs créent les conditions qui produisent la conscience olfactive.
100 «Cette conscience est-elle produite à cause du nez en telle sorte que le nez soit son domaine, ou est-elle produite à cause des odeurs, en telle sorte que les odeurs soient son domaine ?
100 «Ananda, si elle était produite à cause du nez, alors dans ton mental, qu'est-ce que tu prends pour le nez? Crois-tu qu'il prenne la forme de deux pinces de chair, ou tiens-tu qu'il ait la capacité inhérente de la nature qui perçoit les odeurs comme résultat d'un mouvement ?
101 «Si tu soutiens que le nez c'est des pinces de chair, la chair est une partie intégrale de ton corps et la perception du corps, c'est le toucher. Il faudrait alors l'appeler «corps» au lieu de «nez» et ses objets seraient ceux du toucher. Comme on n'appellerait même pas ça un nez, comment pourrait-on établir un domaine pour lui ?
102 «Si tu soutiens que c'est l'acte de sentir qui est perçu, alors dans ton opinion, qu'est-ce qui perçoit ? Si c'était la chair, fondamentalement, ce que la chair perçoit, c'est les objets du toucher, qui n'ont rien à voir avec le nez.
102 «Si c'était la vacuité, alors la vacuité percevrait d'elle-même et la chair n'aurait aucune conscience. Si c'était le cas, alors l'espace vide serait toi, et comme ton corps serait sans perception, Ananda n'existerait pas.
103 «Si c'étaient les odeurs qui percevaient, la perception elle-même reposerait sur les odeurs. Qu'auraient-elles à voir avec toi ?
103-104 «Si tu insistes que les odeurs autant des parfums que des puanteurs sont produites par ton nez, alors ces deux flottements d'odeurs de parfum et de puanteur ne sortiraient pas du bois d'airavana ou de chandana. Etant donné que les odeurs ne proviendraient pas de ces deux choses, lorsque tu sentirais ton propre nez, serait-il parfumé ou puant ? Ce qui pue n'est pas parfumé ; ce qui est parfumé ne pue pas.
105 «Si tu pouvais sentir autant le parfum que la puanteur, alors toi, en tant qu'une seule personne, tu devrais avoir deux nez, et je serais en train de poser des questions à deux Ananda. Lequel serait toi ?
«Si tu n'as qu'un seul nez, alors parfum et puanteur n'auraient pas deux identités séparées. Comme la puanteur serait parfum et le parfum serait puanteur, manquant ainsi de deux natures distinctes, qu'est-ce qui constituerait le domaine ?
106 «Si la conscience olfactive était produite à cause des odeurs, elle existerait à cause des odeurs. De même que les yeux peuvent voir mais sont incapables de se voir eux-mêmes, de même, si la conscience olfactive existait à cause des odeurs, elle n'aurait pas conscience des odeurs.
107 «Si elle n'en avait aucune conscience, elle ne serait pas une conscience. Si la conscience n'était pas consciente des odeurs, alors le domaine ne pourrait pas être établi à partir des odeurs. Si la conscience n'était pas consciente des odeurs, alors le domaine ne pourrait pas être établi à cause des odeurs.
«Puisqu'aucun domaine de la conscience n'existerait entre elles, alors comment pourrait l'un quelconque des phénomènes internes ou externes exister ? Une nature de l'odorat comme celle-là serait en fin de compte vide et fausse.
108 «De là, tu dois comprendre qu'en ce qui a trait au nez et aux odeurs qui seraient les conditions qui produisent le domaine de la conscience olfactive, aucune de ces trois places n'existe. Fondamentalement, la nature du nez, des odeurs et le domaine de la conscience olfactive, tous trois, ne peuvent être attribués ni aux causes et conditions, ni à la spontanéité.
110 «Qui plus est, Ananda, comme tu l'entends, la langue et les saveurs créent les conditions qui produisent la conscience gustative.
«Cette conscience est-elle produite à cause de la langue en sorte que la langue soit son domaine, ou est-elle produite à cause des saveurs, en sorte que les saveurs soient leur domaine?
111 «Ananda, si elle était produite à cause de la langue, alors tout le sucre de canne, les pruneaux noirs, les huang-lien, le sel, le xixing, le gingembre et la cassia du monde seraient entièrement sans saveur. De plus, lorsque tu goûtes ta propre langue, seraient-elle douce ou amère ?
112 «Si la saveur naturelle de ta langue était amère, alors qu'est-ce qui goûterait ta langue ? Comme la langue ne peut se goûter elle-même, qui aurait le sens du goût ? Si la saveur naturelle de la langue n'était pas amère, alors elle ne pourrait pas engendre des goûts. En ce cas, comment un domaine pourrait-il être établi ?
«Si la conscience gustative était produite à cause de la saveur, la conscience elle-même serait une saveur. Le cas serait alors semblable à celui de la langue organe qui serait incapable de se goûter elle-même. Comment la conscience pourrait-elle savoir si elle a une saveur ou pas ?
113 «Qui plus est, les nombreuses saveurs ne proviennent pas toutes d'une seule chose. Puisque les saveurs sont produites par de nombreuses choses, la conscience devrait avoir de nombreuses substances.
114 «Si la conscience était une seule substance et que cette substance était absolument produite par la saveur, alors, lorsque les saveurs salée, fade, douce, et acide étaient combinées, leurs diverses différences se changeraient en une seule saveurs et il n'y aurait pas de distinctions entre elles.
«S'il n'y avait pas de distinctions, elle ne pourrait pas être appelée conscience. Ainsi, comment pourrait-elle être appelée en plus le domaine de la langue, de la saveur, et de la conscience ?
115 «Ce n'est pas l'espace vide non plus qui pourrait produire ta conscience consciente.
«La langue et les saveurs ne pourraient pas se combiner sans que chacune en perde sa nature fondamentale. Comment donc, en ce cas, un domaine pourrait-il être produit ?
115-16 «De là, tu dois comprendre qu'en ce qui a trait à la langue et aux saveurs qui seraient les conditions qui produisent le domaine de la conscience gustative, aucune de ces trois places n'existe. Fondamentalement, la nature de la langue, des saveurs, et le domaine de la conscience gustative, tous trois, ne peuvent être attribués ni aux causes et conditions, ni à la spontanéité.
116 «Qui plus est, Ananda, comme tu l'entends, le corps et les objets du toucher créent les conditions qui produisent la conscience tactile.
117 «Cette conscience est-elle produite à cause du corps, en telle sorte que le corps soit son domaine, ou est-elle produite à cause des objets du toucher, en sorte que les objets du toucher seraient son domaine ?
«Ananda, si elle était produite à cause du corps, le corps seul ne peut générer la conscience du contact ou de la séparation. De quoi le corps serait-il conscient ?
118 «Si elle était produite à cause des objets du toucher, alors ton corps ne serait pas nécessaire. Mais qui peut percevoir le contact avec autre chose que le corps ?
«Ananda, les choses ne perçoivent pas les objets du toucher; c'est le corps qui le fait.
119 «Ce que connaît le corps, ce sont les objets du toucher, et ce qui est conscient des objets du toucher, c'est le corps. Les objets du toucher ne sont pas le corps, et le corps n'est pas les objets du toucher.
120 «Ces deux entités du corps et des objets du toucher n'ont fondamentalement pas d'emplacement. Si c'était la conscience tactile qui vient en contact avec le corps, alors elle serait la propre substance et nature du corps. Si la conscience tactile était séparée du corps, alors elle serait comme l'espace vide.
«Comme les aspects interne et externe ne peuvent être établis, comment peut-on établir quelque chose entre eux ? Comme on ne peut établir aucun intermédiaire de la sorte, les aspects interne et externe sont par nature vides. D'où alors, proviendrait ta conscience ?
121 «De là, tu dois comprendre qu'en ce qui a trait au corps et aux objets du toucher qui seraient les conditions qui produisent le domaine de la conscience tactile, aucune de ces trois places n'existe. Fondamentalement, la nature du corps, des objets du toucher, et le domaine de la conscience tactile, tous trois, ne peuvent être attribués ni aux causes et conditions, ni à la spontanéité.
122 «Qui plus est, Ananda, comme tu l'entends, le mental et les dharmas créent les conditions qui produisent la conscience mentale.
«Cette conscience est-elle produite à cause du mental, en telle sorte que le mental soit son domaine, ou est-elle produite à cause des dharmas, en telle sorte que les dharmas seraient son domaine?
123 «Ananda, si elle était produite à cause du mental, dans ton mental il y aurait certainement des pensées qui donnent de l'expression à ton mental. S'il n'y avait pas de dharmas devant toi, le mental ne donnerait naissance à rien. A part des conditions, il n'aurait pas de forme ; de la sorte, de quel usage lui serait la conscience ?
124 «Qui plus est, est-ce que ta conscience mentale est la même que l'organe du mental avec ses processus de pensée et ses discriminations, ou est-elle différente ? Si elle était la même chose que le mental, alors elle serait le mental, et dans ce cas, comment pourrait-elle produite quelque chose ? Si elle était différente du mental, elle n'aurait aucune conscience. Si elle n'avait aucune conscience, comment pourrait-elle être produite par le mental ? Si elle avait la conscience, comment le mental pourrait-il être conscient de lui-même ? Comme il est par nature ni pareil ni différent, comment pourrait-on établir un domaine ?
125 «S'il était produit à cause des dharmas, aucun des dharmas mondains n'existe à part des cinq objets impurs. Considère les dharmas de la forme, du son, de l'odeur, du goût, et du toucher : chacun a une apparence clairement distincte et est apparié à l'un des cinq organes. Ils ne sont pas ce que capte le mental.
«Si ta conscience était effectivement produite par sa dépendance sur les dharmas, alors considère les maintenant : à quoi ressemble chacun de ces dharmas ?
126 «A part des attributs de forme et de vacuité, de mouvement et d'immobilité, de pénétration et d'obstruction, d'unité et de séparation, et de surgissement et de cessation, il n'existe rien du tout.
«Lorsqu'il y a surgissement, alors la forme, la vacuité et tous les dharmas surgissent. Lorsqu'il y a cessation, alors la forme, la vacuité et tous les dharmas cessent d'être. Comme les causes objectives n'existent pas, à quoi ressemble donc la conscience que produisent ces causes ? S'il n'y a rien qu'on puisse discerner dans la conscience, comment pourrait-on lui établir un domaine ?
127 «De là, tu dois comprendre qu'en ce qui a trait au mental et aux dharmas qui seraient les conditions qui produisent le domaine de la conscience mentale, aucune de ces trois places n'existe. Fondamentalement, la nature du mental, des dharmas et le domaine de la conscience mentale, tous trois, ne peuvent être attribués ni aux causes et conditions, ni à la spontanéité».
128 Ananda dit au Bouddha: «Honoré du Monde, en discutant des dharmas du mélange et de l'unité et des causes et conditions, l'Ainsi-Venu a souvent dit que les transformations de tous les phénomènes mondains peuvent être découvertes dans le mélange et l'unification des quatre éléments
.
129 «Pourquoi l'Ainsi-Venu rejette-t-il les causes et conditions et aussi la spontanéité ? Je ne comprends pas ce à quoi s'applique ce que vous entendez.
130 «Ayez, je vous en prie, assez de compassion pour nous instruire des dharmas qui adhèrent au sens complet de la Voie médiane et ne sont pas des spéculations philosophiques».
131 Alors, l'Honoré du Monde dit à Ananda: «Tu as déjà renoncé aux dharmas du Petit Véhicule des Auditeurs et de Ceux qui sont Eveillés aux Conditions, et tu as résolu de rechercher avec diligence la Bodhi insurpassée. A cause de cela, je vais maintenant t'expliquer le Sens Complet de la Voie Médiane.
132 «Pourquoi t'attaches-tu toujours aux spéculations philosophiques mondaines et aux fausses pensées sur les causes et conditions?
«Quoique tu sois très savant, tu es comme quelqu'un qui pourrait discuter de médecine, mais ne saurait la reconnaître lorsqu'on la place devant toi. L'Ainsi-Venu dit que tu es vraiment pitoyable.
133 «Ecoute attentivement maintenant, que je t'explique ce point de détail qui te permettra à toi et à d'autres dans le futur de cultiver le Grand Véhicule pour pénétrer dans la réalité ultime».
Ananda garda le silence et attendit le sage enseignement du Bouddha.
134 «Ananda, selon ce que tu dis, le mélange et l'unification des quatre éléments peut être découvert dans les myriades de transformations de tous les phénomènes mondains.
«Ananda, si les natures de ces éléments ne se mélangeaient ni ne s'unissaient, alors elles ne pourraient se combiner avec d'autres éléments, de même que l'espace vide ne peut se combiner avec les formes.
135 «Si les natures de ces éléments ne se mélangent ni ne s'unissent, elles sont elles-mêmes des transformations en un processus sans fin de s'amener l'une l'autre dans l'existence. La continuation du fait de venir et de cesser à être, des naissances et de la mort, des morts et des naissances, est comme l'ininterrompue roue de flammes qui apparaît lorsqu'on fait tourner une torche en cercle.
«Ananda, ce processus est comme l'eau qui devient de la glace et de la glace qui retourne en eau.
139 «Considère la nature de la terre : son aspect le plus grossier est la terre elle-même ; son aspect le plus subtil est un grain de poussière, qui au plus petit serait une particule de poussière à la limite de la vacuité.
140 «Si on divisait une de ces particules de poussière qui est à peine de la forme au départ, en sept parties et qu'on séparait l'une de ces parties, on arriverait à la vacuité elle-même.
«Ananda, si une particule de poussière à la limite de la vacuité peut être divisée pour arriver à la vacuité, ce serait que la vacuité peut donner naissance à la forme.
«Juste à l'instant, tu m'as demandé si le mélange et l'unification ne sont pas ce qui amène toutes les transformations mondaines.
141 «Tu dois considérer avec soin à quel point la vacuité se mélange et s'unit avec elle-même pour arriver à une seule particule de poussière à la limite de la vacuité. Une telle particule ne serait pas composée d'autres particules de poussière à la limite de la vacuité.
«Qui plus est, comme les particules de poussière à la limite de la vacuité peuvent être réduites à la vacuité, de combien de particules de telle forme serait alors composée la vacuité ?
142 «Quand ces particules de forme se massent ensemble, une masse de forme ne fait pas la vacuité ; lorsque vacuité est amassée ensemble, une masse de vacuité ne fait pas forme. A part ça, quoique la forme puisse être divisée, comment la vacuité peut-elle être amassée ensemble ?
143 «Tu n'as toujours pas réalisé que dans le Trésor de l'Ainsi-Venu, la nature de la forme est vraie vacuité et la nature de la vacuité est vraie forme. Cette pureté fondamentale compénètre tout le Domaine du Dharma. Les esprits des êtres l'absorbent selon leur capacité à le savoir.
«Quoi qui se manifeste le fait en accord avec le karma. Ignorants de ce fait, les peuples du monde s'illusionnent assez pour assigner son origine aux causes et conditions de la spontanéité. Ces erreurs qui proviennent des discriminations et des processus de raisonnement du mental, ne sont rien que le jeu de mots vides et insensés.
144 «Ananda, la nature du feu est privée d'identité, étant donné qu'il est dépendant de diverses causes et conditions pour son existence. Considère une famille dans la ville, qui n'a pas encore mangé. Lorsqu'ils souhaitent préparer de la nourriture, ils tiennent un miroir de laiton face au soleil, cherchant le feu.
145 «Ananda, lorsqu'on parle de mélange et d'unité, toi et moi, et les douze cents cinquante Bhikshus réunis formons une communauté. Cependant, une analyse soigneuse de la communauté révélerait que chacun des membres qui la compose a son propre corps, son propre nom de famille, de clan et nom personnel. Par exemple, Çariputra est un Brahmane, Uruvilva est un membre du clan Kaçyapa, et toi, Ananda, tu viens de la famille Gautama.
147 «Ananda, si le feu existait à cause du mélange et de l'unification, alors, lorsque ta main tient le miroir face au soleil pour obtenir du feu, ce dernier sort-il du miroir ? Vient-il de l'amadou moxa ? Ou vient-il du soleil ?
148 «Ananda, si le feu venait du soleil, alors non seulement il brûlerait l'amadou moxa dans ta main, mais en passant à travers les bosquets d'arbres, il les brûlerait aussi.
«Suppose qu'il venait du miroir, comme il sortirait du miroir pour allumer l'amadou moxa, pourquoi le miroir ne fondrait-il pas ? Et pourtant, si ta main qui tient le miroir ne ressent pas de chaleur, comment le miroir fondrait-il?
148-149 «Si le feu provenait de l'amadou moxa, alors pourquoi est-ce qu'on ne générerait le feu que lorsque le brillant miroir était mis en contact avec l'aveuglante lumière ?
149 «Qui plus est, à y regarder de plus près, tu constateras que le miroir tient dans ta main, que le soleil est haut sur l'horizon, et que le moxa pousse par terre. En ce cas, d'où vient le feu ?
«Le soleil et le miroir ne peuvent se mélanger et s'unir, vu qu'ils sont très éloignés l'un de l'autre. Et ce n'est pas non plus que le feu surgisse spontanément sans avoir d'origine.
150 «Tu n'as pas encore réalisé que dans le Trésor de l'Ainsi-Venu, la nature du feu est véritable vacuité, et que la nature de la vacuité est du vrai feu. Cette pureté fondamentale compénètre tout le Domaine du Dharma. Les esprits des êtres l'absorbent selon leur capacité à le savoir.
151 «Ananda, tu dois bien savoir que le feu peut être généré n'importe où avec un miroir tenu face à la lumière du soleil. Si des miroirs étaient tenus face à la lumière du soleil, partout dans le Domaine du Dharma, le feu serait généré partout. Comme le feu peut surgir partout dans le monde entier, peut-il y avoir un quelconque emplacement spécifique auquel il serait confiné ?
«Tout ce qui se manifeste le fait en accord avec le karma. Ignorants de ce fait, les peuples du monde s'illusionnent assez pour assigner son origine aux causes et conditions de la spontanéité. Ces erreurs qui proviennent des discriminations et des processus de raisonnement du mental, ne sont rien que le jeu de mots vides et insensés.
151-52 «Ananda, la nature de l'eau est mutable, son écoulement et sa cessation sont erratiques. Kapila, Chakra, Padma, Hasta, et d'autres grands magiciens de Çravasti tiennent souvent des instruments vers la lumière de la pleine lune à minuit pour en extraire l'essence de l'eau pour mélanger avec leurs drogues.
153 «Est-ce que l'eau sort de la boule de cristal qui est utilisée, ou existe-t-elle naturellement dans l'espace , Ou vient-elle de la lune ?
«Ananda, si l'eau provenait de la lune distante, alors l'eau devrait aussi couler de toutes les herbes et de tous les arbres lorsque le clair de lune passe sur eux en route vers la boule de cristal. Si elle coulait d'eux, pourquoi attendre qu'elle se condense sur la boule de cristal ? Puisqu'elle ne coule pas des arbres, alors il est clair qu'elle ne peut pas descendre de la lune.
154 «Si elle provenait de la boule de cristal, alors elle devrait en couler en tous temps. Pourquoi attendre minuit et le clair de la pleine lune pour la recevoir ?
«Si l'eau venait de l'espace, qui est par nature sans limite, elle coulerait partout jusqu'à ce que tout ce qu'il y a entre le ciel et la terre soit submergé. Comment donc pourrait encore voyager par eau, par terre et par air ?
155 «Se plus, après examen plus serré, tu t'apercevras que la lune se déplace dans le ciel, la boule de cristal est tenue dans la main, et le récipient pour recevoir l'eau est mis là par quelqu'un. Alors, d'où vient l'eau qui coule dans le récipient ?
156 «La lune et la boule de cristal ne peuvent se mélanger et s'unir, vu la distance qui les sépare. Et l'essence de l'eau ne peut pas surgir spontanément sans origine.
«Tu n'as pas encore réalisé que dans le Trésor de l'Ainsi-Venu, la nature de l'eau est véritable vacuité, et que la nature de la vacuité est vraie eau. Cette pureté fondamentale compénètre tout le Domaine du Dharma. Les esprits des êtres l'absorbent selon leur capacité à le savoir.
157 «Une boule de cristal peut être tenue à un certain endroit, et l'eau en sortira. Si des boules de cristal étaient tenues partout dans le Domaine du Dharma, alors partout dans le Domaine du Dharma, l'eau viendrait. Comme l'eau peut venir partout dans le monde entier, peut-il y avoir un quelconque endroit auquel elle serait confinée ?
158 «Tout ce qui se manifeste le fait en accord avec le karma. Ignorants de ce fait, les peuples du monde s'illusionnent assez pour assigner son origine aux causes et conditions de la spontanéité. Ces erreurs qui proviennent des discriminations et des processus de raisonnement du mental, ne sont rien que le jeu de mots vides et insensés.
«Ananda, la nature du vent n'a pas de substance, et ses schémas de mouvement et d'immobilité sont erratiques. Tu ajustes toujours ta robe lorsque tu entres dans la grande assemblée. Lorsque le coin de ta robe samghati effleure la personne qui t'avoisine, l'air est agité contre le visage de cette personne.
159 «Ce vient provient-il du coin du Kashaya, surgit-il de la vacuité, ou est-elle produite par le visage de la personne effleurée par l'air ?
159-60 «Ananda, si ce vent provenait du coin du Kashaya, alors tu serais enveloppé de vent, et ton kashaya s'envolerait et quitterait ton corps. Mais ma robe reste immobile et pend tout droit pendant que je parle du Dharma au milieu de l'assemblée. Si j'observe ma robe de près, où est le vent dedans ? Le vent ne peut être emmagasiné nulle part dans la robe.
160 «Si les vents provenaient de la vacuité, pourquoi n'y aurait-il pas de mouvement d'effleurement même lorsque ta robe ne bouge pas ? Comme la nature de la vacuité est constante, la nature du vent devrait l'être aussi. Et aussi lorsque le vent s'arrête, la vacuité devrait aussi cesser d'être. L'absence de vent peut être détectée, mais que signifierait la disparition de la vacuité? Si la vacuité allait et venait, elle ne serait pas la vacuité. Et comme elles est vide, comment peut-elle générer du vent ?
161 «Si le vent venait du visage de la personne qu'il effleurait, il soufflerait sur toi, également. Alors, pendant que tu arrangeais ta robe, comment pourrait-il souffler à revers sur d'autres personnes ?
162 «En y regardant mieux, tu trouveras que la robe est arrangée par toi-même, que le visage caressé par le vent appartient à la personne qui te flanque, et que la vacuité est tranquille et n'est pas impliquée dans le mouvement. Alors, d'où vient le vent qui souffle à cet endroit ?
«Le vent et la vacuité ne peuvent se mélanger ni s'unir, vu qu'ils sont différents l'un de l'autre. Et le vent ne pourrait pas non plus exister spontanément sans une origine.
164 «Tu n'as pas encore réalisé que dans le Trésor de l'Ainsi-Venu, la nature du vent est véritable vacuité, et que la nature de la vacuité est vrai vent. Cette pureté fondamentale compénètre tout le Domaine du Dharma. Les esprits des êtres l'absorbent selon leur capacité à le savoir.
«Ananda, de la même manière que toi seul déplaces ta robe légèrement et que cela remue l'air, de la sorte aussi, si un mouvement similaire était produit partout dans le Domaine du Dharma, l'air serait partout agité. Comme le vent peut surgir partout dans le monde, comment pourrait-il y avoir un quelconque endroit auquel elle serait confinée ?
165 «Tout ce qui se manifeste le fait en accord avec le karma. Ignorants de ce fait, les peuples du monde s'illusionnent assez pour assigner son origine aux causes et conditions de la spontanéité. Ces erreurs qui proviennent des discriminations et des processus de raisonnement du mental, ne sont rien que le jeu de mots vides et insensés.
«Ananda, la nature de la vacuité n'a pas de forme ; elle n'est apparente qu'à cause de la forme. Par exemple, Çravasti est éloignée du fleuve, de sorte que lorsque les Kshatriyas, Brahmanes, Vaiçyas, Çudras, Bharadvajas, Chandalas, et ainsi de suite construisent leurs maisons, ils creusent des puits pour trouver de l'eau. Pour chaque pied carré de terre qu'on enlève, un pied carré de vacuité est mis en évidence. Quand on enlève dix pieds carrés de terre, dix pieds carrés de vacuité sont mis en évidence. La profondeur de la vacuité correspond à la quantité de terre qu'on élève.
167 «Cette vacuité sort-elle de la terre ? Ou existe-t-elle à cause de l'excavation ? Ou surgit-elle d'elle-même, sans cause ?
«Ananda, si cette vacuité surgissait d'elle-même sans aucune cause, pourquoi n'était-ce pas évident avant même que la terre soit creusée ? Tout ce qu'on pouvait voir était une grande étendue de terre solide et impénétrable.
«Si la vacuité venait de l'excavation de terre, alors comme on enlevait la terre, on aurait dû voir arriver la vacuité. Si aucune vacuité n'était entrée lorsqu'on a d'abord enlevé la terre, alors comment est-ce que la vacuité aurait pu apparaître à cause de l'enlèvement de la terre ?
168 «Si aucun enlèvement ni apparition n'a eu lieu, alors il n'y aurait aucune différence entre la terre et la vacuité. N'étant en rien différents, ils seraient la même chose. En ce cas, la vacuité ne serait-elle pas enlevée du puits en même temps que la terre, au cours de l'excavation ?
169 «Si vacuité apparaissait à cause de l'excavation, alors celle-ci amènerait de la vacuité plutôt que de la terre. Si la vacuité n'émergeait pas à cause de l'excavation, alors celle-ci n'enlèverait que de la terre. Pourquoi donc voyons-nous apparaître la vacuité pendant qu'on creuse le puits ?
«Considère ceci avec plus d'attention encore. Observe le profondément, et tu trouveras que l'excavation provient des mains de la personne qui est engagée dans cet acte, et que la terre existe à cause de son élévation du sol. Alors qu'est-ce qui cause l'apparition de la vacuité ?
170 «L'excavation et la vacuité, l'une étant substantielle et l'autre insubstancielle, ne sont pas compatibles. Elles ne se mélangent ni ne s'unissent. Ni ne pourrait exister la vacuité spontanément sans une origine.
«Quoique la nature de la vacuité soit complètement compénétrante, et fondamentalement immuable, tu dois savoir que la vacuité, la terre, l'eau, le feu, et le vent sont appelés les cinq éléments. Leurs natures sont véritables, parfaitement fondues, identiques avec le Trésor de l'Ainsi-Venu, et aucun en vient à être ni ne cesse d'être.
171 «Ananda, ton esprit est embourbé et confus, et tu ne t'éveilles pas au fait que la source des quatre éléments n'est autre que le Trésor de l'Ainsi-Venu . Est-ce que la vacuité que tu vois est sujette à être enlevée, ou à entrer, ou est-ce qu'elle n'est pas sujette à être enlevée, ou à entrer ?
«Tu ne t'es pas encore rendu compte que dans le Trésor de l'Ainsi-Venu, la nature de l'Eveil est véritable vacuité, et la nature de la vacuité est véritable Eveil. Cette pureté fondamentale compénètre le Domaine du Dharma.
172 «Les mentaux des êtres l'absorbent selon leur capacité de connaissance.
«Ananda, partout où il y a un puits vide, la vacuité remplit ce puits. La même chose est vraie de la vacuité dans les dix directions. Comme la vacuité emplit les dix directions, comment pourrait-il y avoir un quelconque endroit spécifique où on puisse la trouver ?
173 «Tout ce qui se manifeste le fait en accord avec le karma. Ignorants de ce fait, les peuples du monde s'illusionnent assez pour assigner son origine aux causes et conditions de la spontanéité. Ces erreurs qui proviennent des discriminations et des processus de raisonnement du mental, ne sont rien que le jeu de mots vides et insensés.
173-74 «Ananda, la conscience de la vision ne se perçoit pas elle-même. Elle dépend de la forme et de la vacuité pour son existence. Vous êtes maintenant dans le Bosquet de Jeta où vous voyez la clarté du matin et l'obscurité du soir. Au plus profond de la nuit, , vous voyez la clarté lorsque se lève la lune et que la vue discerne l'obscurité.
174 «Cette vue est-elle identique en substance avec la clarté, l'obscurité ou la vacuité, ou bien ne sont-ils pas de la même substance ? Sont elles semblables et pourtant différentes, ou ne sont-elles ni pareilles ni différentes?
175 «Ananda, suppose que la vue partageait une seule substance avec la clarté, l'obscurité ou la vacuité. L'obscurité et la clarté s'annulent mutuellement. Lorsqu'il fait sombre, il n'y a pas de lumière ; lorsqu'il fait clair, il n'y a pas d'obscurité. Si la vue ne faisait qu'un avec l'obscurité, elle cesserait d'exister dans la clarté ; si elle ne faisait qu'un avec la clarté, cesserait-elle d'exister dans l'obscurité ? Comme elle cesserait d'exister, comment pourrait-elle percevoir la clarté autant que l'obscurité ?
Si la clarté et l'obscurité diffèrent l'une de l'autre, et si la vue n'a ni existence ni cessation de l'existence, comment peut-elle être de la même substance avec la clarté et l'obscurité ?
176 «Si les essences de la vue n'étaient pas une seule substance avec la clarté et l'obscurité, et que tu étais séparé de la lumière, de l'obscurité et de la vacuité, alors de quel forme et apparence serait la source de la vue ?
«En l'absence de l'obscurité, de la clarté et de la vacuité, la vue serait semblable à la fourrure d'une tortue ou aux cornes d'un lièvre. Comment pourrait-il y avoir la vue sans la présence de trois attributs d'obscurité, de clarté et de vacuité ?
177 «Comment la vue pourrait-elle ne faire qu'un avec l'obscurité et la clarté, vu qu'elles sont l'opposé l'une de l'autre ? Et pourtant, comment pourrait-elle être différente de ces trois attributs, vu qu'en leur absence, il n'y aurait pas de vue ?
«Comment la vue pourrait-elle n'être pas un avec la vacuité, vu qu'aucune limite n'existe entre elles ? Mais comment pourrait la vue ne pas être différente de la vacuité, vu que la vue reste inchangée, sans égard à si elle perçoit la clarté ou l'obscurité ?
178 «Examine ceci en détail encore plus fin, fais en une investigation minutieuse, considère-la et contemple-la avec soin. La lumière vient du soleil et l'obscurité de la nouvelle lune ; la pénétration appartient à la vacuité, et la solidité retourne à la terre, et alors, d'où provient l'essence de la vue ?
«La vue possède une conscience puisque la vacuité est inanimée : elles ne se mélangent ni ne s'unissent. L'essence de la vue ne pourrait pas non plus surgir spontanément sans une origine.
179 «Si les natures de la vue, de l'ouïe, et de la connaissance sont compénétrantes et immuables, tu dois savoir que la vacuité stable et sans limites, ensemble avec les éléments instables que sont la terre, l'eau, le feu et le vent, sont connus comme les six éléments. Leurs natures sont vraies, parfaitement fusionnées, identiques avec le Trésor de l'Ainsi-Venu, et fondamentalement privées de venue à être comme de cessation d'être.
179-80 «Ananda, ta nature est si submergée que tu ne t'es pas rendu compte que ta vue, ton ouïe, ta conscience et ta connaissance sont fondamentalement le Trésor de l'Ainsi-Venu. Observe la vue, l'ouïe, la conscience, et la connaissance pour voir si elles sont sujettes à venir à l'existence et à cesser d'être ; si elles sont identiques ou différentes ; si elles ne sont pas sujettes à venir à l'existence et à cesser d'être ; et si elles ne sont ni identiques ni différentes.
180-81 «Tu ne t'es pas encore rendu compte que dans le Trésor de l'Ainsi-Venu, la nature de la vue est clarté éveillée, et que l'essence de l'Eveil est la claire vision. Cette pureté fondamentale compénètre le Domaine du Dharma.
181 «Les mentaux des êtres l'absorbent selon leur capacité de connaissance. De même que la capacité des yeux à voir compénètre le Domaine du Dharma, de même aussi le font les capacités à entendre, à sentir, à goûter, à toucher et à savoir. Toutes ces capacités sont des qualités glorieuses et magnifiques. Comme elles compénètrent le Domaine du Dharma, et remplissent toute vacuité dans les dix directions, comment pourrait-il y avoir un quelconque endroit spécifique où on puisse la trouver ?
182 «Tout ce qui se manifeste le fait en accord avec le karma. Ignorants de ce fait, les peuples du monde s'illusionnent assez pour assigner son origine aux causes et conditions de la spontanéité. Ces erreurs qui proviennent des discriminations et des processus de raisonnement de l'esprit conscient, ne sont rien que le jeu de mots vides et insensés.
182 «Ananda, la nature de la conscience n'a pas de source, mais il s'agit d'une fausse manifestation basée sur les six organes et leurs objets correspondants. Jette un regard, maintenant, sur l'entière assemblée réunie ici. Les observations faites par tes yeux sont similaires à des réflexions dans un miroir, les deux étant privées de capacité à opérer des distinctions.
185 «Cependant, ta conscience va systématiquement identifier ce qui est vu : ça c'est Manjuçri, ça c'est Purna, là c'est Maudgalyayana, là c'est Subhuti, et celui-là c'est Çariputra.
186 «Est-ce que la conscience qui est consciente et sait vient de la vue, des formes, de la vacuité, ou surgit-elle soudain sans une cause ?
«Ananda, si ta conscience provenait de la vue, alors, en l'absence des quatre attributs de la clarté, de l'obscurité, de la forme, et de la vacuité, tu ne pourrais pas voir. Comme ces attributs n'existeraient pas, d'où viendrait alors ta conscience ?
187 «Si ta conscience surgissait de la forme plutôt que du fait de voir la forme, elle ne verrait ni la clarté ni l'obscurité. En l'absence de la clarté et de l'obscurité, elle ne verrait ni forme ni vacuité, non plus. Puisque ces attributs n'existeraient pas, d'où proviendrait ta conscience ?
«Si elle provenait de la vacuité, elle ne serait ni une apparence, ni la vue. Sans la vue, elle ne fonctionnerait pas, étant incapable de discerner la clarté, l'obscurité, les formes, ou la vacuité par elle-même. Sans les apparences, il n'y aurait ni conditions externes, et donc aucun emplacement où la vue l'ouïe, la conscience et la connaissance pourraient être établies.
188 «N'étant située à aucun de ces deux endroits, la conscience serait vide, comme si elle n'existait pas. Si elle existait pourtant, elle ne serait pas un phénomène. Même si tu pouvais exercer une conscience, comment discernerait-elle quoi que ce soit ?
189 «Si elle surgissait soudainement sans cause, pourquoi ne peux-tu discerner la lumière de la lune dans celle du soleil ?
«Et recherche encore plus soigneusement, distingue -le encore plus en détail et regardes-y dedans. La vue appartient à tes yeux, les apparences sont considérées être l'environnement, ce qui a une apparence existe. Ce qui n'a pas d'apparence n'existe pas. Que sont alors les conditions qui causent que la conscience vienne à être ?
190 «La conscience se déplace et la vue est immobile ; elle ne se mélangent et ne s'unissent pas. L'odorat, l'ouïe, la conscience, et la connaissance font de même. Pas plus ne pourrait la condition de la conscience exister spontanément sans une origine.
«Si les consciences appartenant au mental ne provenaient de nulle part, la même chose serait vraie des natures de la vue, de l'ouïe, de la conscience, et de la connaissance, qui sont toutes complètes et tranquilles et ne viennent de nulle part. Ensemble avec la vacuité, la terre, l'eau, le feu, et le vent, elles sont appelées les sept éléments. Leurs natures sont véritables, parfaitement fusionnées, identiques avec le Trésor de l'Ainsi-Venu, et fondamentalement privées de venue à être comme de cessation d'être.
191 «Ananda, ton mental est grossier et sans profondeur, et ainsi tu ne perçois pas que la vue, l'ouïe, et la conscience qui en résultent sont le Trésor de l'Ainsi-Venu. Observe ces six emplacements de la conscience pour voir si ils sont identiques ou différents ; vides ou existants ; ni identiques ni différents ; ou ni vides ni existants.
192 «Tu ne t'es pas encore rendu compte que dans le Trésor de l'Ainsi-Venu, la nature de la conscience est claire connaissance, et la clarté éveillée est la véritable conscience. L'Eveil merveilleux est tranquille et compénètre le Domaine du Dharma.
«Il comprend la vacuité des dix directions et en provient. Comment pourrait-il avoir un emplacement ?
193 «Tout ce qui se manifeste le fait en accord avec le karma. Ignorants de ce fait, les peuples du monde s'illusionnent assez pour assigner son origine aux causes et conditions de la spontanéité. Ces erreurs qui proviennent des discriminations et des processus de raisonnement du mental, ne sont rien que le jeu de mots vides et insensés».
194 A ce moment, Ananda et la grande assemblée, emplis de l'enseignement subtil et merveilleux du Bouddha, l'Ainsi-Venu, ressentirent une paix physique et mentale sans obstacle. Tous les membres de la grande assemblée se rendirent compte d'à quel point leur esprit compénètre les dix directions, regardant la vacuité dans les dix directions ainsi qu'on pourrait regarder une feuille ou autre objet tenu dans la paume de la main.
196 Tous les phénomènes mondains devinrent l'esprit primal merveilleusement clair de la Bodhi.
197 L'essence du mental leur devint complètement compénétrante, contenant les dix directions.
Chacun considéra son corps physique comme étant semblable à une particule de poussière charriée dans les dix directions ; parfois visible, parfois pas, ou comme étant comme une simple bulle flottant sur le vaste et clair océan, surgissant de nulle part et sombrant dans l'oubli. Chacun comprit et sut personnellement le merveilleux esprit fondamental possédé par tous comme étant éternel et ne cessant jamais d'être.
199 Ils se prosternèrent devant le Bouddha et joignirent leurs paumes, ayant passé par cette expérience sans précédent. Alors, devant l'Ainsi-Venu, Ananda prononça ces vers en louange du Bouddha.
«La Dharani
merveilleusement
profonde,
L'immuable Honoré
du Monde,
Le suprême Roi du
Çurangama
Se rencontre rarement en ce
monde.
201 Elle dissout mes pensées
inversées
Rassemblées
à travers des
milliards d'éons,
Que je n'aie pas à
endurer des
asamkhyeya d'éons
Pour obtenir le corps du
Dharma.
202 «Je souhaite maintenant achever le
résultat
Et devenir un roi
honoré,
Qui revient alors sauver les
êtres
Aussi nombreux que les sables
du Gange.
J'offre à
tous cette pensée
profonde,
Dont le nombre est comme des
poussières en Terres des Bouddhas.
Pour repayer la
bonté que m'a
montré le Bouddha.
204 «Je demande humblement à
l'Honoré du
Monde de
Certifier mon voeu de revenir
aux cinq
troubles domaines mauvais,
Et qu'aussi longtemps qu'un
seul être
ne sera pas devenu un Bouddha.,
A la mort, je n'entrerai pas
au Nirvana.
207 «Héros exalté
à
l'impressionnante force,
A la grande bonté
et compassion,
Recherche et disperse
même les doutes
les plus subtils.
208 «Faisant en sorte que j'atteigne
rapidement l'Eveil
suprême,
Et m'assoie aux endroits de la
Voie dans les
domaines des dix directions.
208 «Si même la nature de la
vacuité devait
entièrement fondre,
Cet esprit de diamant ne
fléchira jamais.